La graphie occitane  

Référence Gaston Bazalgues

Pour écrire leur langue issue du latin populaire parlé, les premiers scribes occitans ont dû adapter le système orthographique du latin problème commun à toutes les langues romanes (français, italien, espagnol, catalan, …). Ce système orthographique sera celui de l’occitan jusqu’au 15e siècle. Après la croisade contre les albigeois, l’occitan est peu à peu chassé de l’école et de la vie administrative. L’édit de Villers-Cotterêts l’interdit officiellement en 1539. Les occitans parlent toujours leur langue, mais perdent leur système orthographique. s’ils veulent écrire dans leur langue, ils n’ont comme référence que le système du français. Chaque auteur occitan essaye de l’adapter à à sa langue revenue à l’état sauvage et ainsi naissent ce qu on appelle les graphies patoisantes de la langue d’oc. Cela jusqu’au XIXe siècle.

Des tentatives de normalisation graphique se multiplient. Originaire des Alpes de Provence, Honnorat propose dans son dictionnaire (1840) un système orthographique très proche de celui des troubadours et qui tout en respectant les dialectes permet leur intercompréhension. Ce système d’abord salué par Roumanille sera rejeté par ce dernier qui imposera une graphie française et rhodanienne à l’ensemble occitan. Cette graphie félibréenne (du nom de l’école littéraire d’Avignon dont Roumanille est, en 1854, un des fondateurs) est à tort parfois appelée mistralienne, Mistral ayant accepté ce système avec difficulté.

La graphie félibréenne est donc celle de la Renaissance littéraire occitane du XlXe siècle, avant tout localisée en Provence. Elle ne résout pas les problèmes posés par l’éparpillement dialectal et les autres régions occitanes entrant dans la Renaissance ne peuvent l’accepter. Les languedociens dès 1896 reprennent et modernisent la graphie des troubadours grâce aux travaux du limousin Joseph Roux puis de l’Escola occitana de Antonin Perbosc et Prosper Estieu, fondée en 1919.

En 1930 La Société d’Études Occitanes la vulgarise encore et Louis Alibert la perfectionne en 1935 dans sa grammaire puis dans son dictionnaire publié après sa mort en 1966 par l’lnstitut d’Études Occitanes.

De nos jours la graphie occitane permet de lire les troubadours dans leur texte; elle est celle des auteurs modernes, des chanteurs aussi. La graphie félibréenne subsiste aussi en Provence.

L’alphabet occitan

L’alphabet comprend 23 lettres.

A a    B be    C ce    D de    E e    F èfa    G ge   H acha   I i    J gi   L èla   M èma   N èna   O o

P pe   Q cu    R èrra   S èssa   T te   U u   V ve   X icsa   Z zèda

La prononciation des voyelles

L’occitan n’est pas une langue unifiée comme le français écrit. Il a une prononciation très diversifiée. Nous donnons ici une prononciation languedocienne centrale.  a et à se prononcent comme dans le mot français chat caval se lit kabal (cheval) cantaràs se lit kantaras (tu chanteras)

a marque du féminin

– se prononce a dans les articles définis la, las, les articles contractés, les possessifs ma, ta, sa.
– se prononce o partout ailleurs. la porta se lit la porto (la porte)

a et á en finales de verbes se prononcent o parla se Iit parlo (il parle) podiás se lit poudios (tu pouvais) parlan se lit parlon (ils parlent),

o pouvant être remplacé par ou (parloun) à la 3e personne du pluriel.

á et à portent toujours l’accent tonique.

e n’est jamais muet comme en français.

e et é se prononcent comme dans le mot français blé negre se lit nègre (noir) pél se lit pél (cheveu)

è se prononce comme dans le mot français mer lèbre se lit lèbré (lièvre)

é et è portent toujours l’accent tonique.

i se prononce généralement i comme en français ric se lit rik (riche)

o et ô se prononcent ou lo lop se lit lou loup (le loup) renós se lit rénouss (hargneux)

ò se prononce o la mòstra se lit la mostro (la montre)

ò et ó portent toujours l’accent tonique.

u se prononce comme dans le mot français mule segur se lit ségur (sûr)

u se prononce ou après voyelle sauf s’il porte un tréma paure se lit paouré (pauvre) diurn se lit diurn (diurne).

 

La prononciation des consonnes

Nous n’indiquons ici que ce qui différencie l’occitan du français.

b et v ont une prononciation à peu près identique et proche du castillan b vaca se lit bako (vache)

g se prononce dj devant e et i gelada se lit djélado (gelée) ginèsta se lit djinèsto (genêt)

g se prononce tch en fin de mot après voyelle estug se lit éstutch (étui)

h remplace souvent f en gascon. C’est une aspiration la hèsta: la fête, la fèsta (fèsto) en languedocien, etc.

j se prononce dj joc se lit djok (jeu)

m en fin de mot se prononce souvent n cantam se lit cantan (nous chantons)

n en fin de mot ne se prononce pas pan se lit pa (pain)

r est presque toujours « roulé »; il ne se prononce pas en finale de verbe à l’infinitif, en fin de mot parfois parlar se lit parla (parler)

Tableau récapitulatif des principaux faits de prononciation

a marque du féminin se prononce o
e n’est jamais muet
o et ó se prononcent ou
ò se prononce o
ch se prononce tch
lh et nh équivalent à ill et gn du français gn se prononce n redoublé
r de l’infinitif n’est jamais prononcé

L’accentuation

Les mots terminés par une voyelle ou une voyelle suivie de s ont l’accent tonique sur l’avant-dernière syllabe fenèstra, negresa, espatla
Les mots terminés par une consonne autre que s ou par une diphtongue ont l’accent tonique sur la dernière syllabe cantar, jamai, pauruc
Cas particulier des mots terminés par une voyelle suivie de n:
1 ) si ce sont des verbes, ils ont l’accent tonique sur l’avant dernière syllabe cantan, legisson
2) partout ailleurs l’accent tonique tombe sur la dernière syllabe: fenestron (petite fenêtre)

Les mots qui font exception à ces règles portent un accent graphique: l’accent aigu. Les voyelles portant un accent grave sont toniques penós (pénible), espés (épais), de galís (obliquement) cantarà, la pòrta, la lèbre.

Les parlers occitans

Nous ne savons pas grand chose des dialectes occitans du Moyen-Age et ne connaissons qu’une langue unifiée alors par l’écriture. Dès que l’écriture a été abandonnée, les anciens dialectes ont dû se développer et l’occitan moderne n’est donc pas une langue homogèneL’occitan parlé dans le Lot fait partie du Nord languedocien à la limite du limousin et de l’auvergnat. La langue parlée, le carcinol se rattache au languedocien du Nord, pas loin du limousin et de l’auvergnat

Les grands dialectes occitans sont indiqués sur la carte ci-dessous

Le parler quercynois

Le parler carcinòl fait partie du dialecte languedocien de la langue occitane, ou langue d’oc. Voici quelques particularités du parler quercynois :

Dans les monosyllabes le a se prononce souvent o : lo can ( le chien) lou co, lo pan (le pain) lou po, plan (beaucoup) plo, la (article féminin) lo.
Au milieu d’un mot, le a peut se transformer en un son proche du o : la campana (la cloche) lo compono, la cadièra (la chaise) lo codièro.
Les pluriels des verbes en -an se disent souvent on : parlan (ils parlent) porlon, cantan (ils chantent) konton, parlaràn (ils parleront) porloron , cantaràn (ils chanteront) contoron.
Les consonnes finales parfois ne s’entendent pas : Cajarc kodjar, Lauzés lawzé, Gramat groma, mancat (manqué) monka, bastit (bâti) bosti.
Les c et p de la fin d’un mot, et aussi les -ch et -eg (qui font tch d’habitude) deviennent un t : lo ròc (rocher) lou rot, lo lop (le loup) lou lout, estrech (étroit) éstrét, lo puèg (la colline) lou pèt.
Dans l’est du Quercy, le l qui est devant une consonne devient un w : l’alba (l’aube) l’albo o l’awbo.
Le pronom personnel neutre, qui s’écrit o, se prononce souvent zou, et z’ devant une voyelle : o farai (je le ferai) zou faray, o aviá vist (il l’avait vu) z’abio bist.
Mais surtout ceux qui parlent occitan doivent toujours essayer de retrouver leur façon personnelle de prononcer.
Les zones de l’occitan carcinòl sont marquées sur cette carte (le contour représente le département du Lot)

carcinol

D’après Poulet et Krispin, dans Los parlars carcinòls, Cercle occitan de Figeac, IEO du Lot, 1991

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