Catégorie : Histoire

Jacques DUEZE, pape sous le nom de Jean XXII – (Cahors 1245 – Avignon 1334)

Jacques Duèze (ou d’Euze) est né à Cahors vers 1245, d’une famille de banquiers. L’évêque de Toulouse lui ouvre la voie vers la cour de Rome. Jacques Duèze a étudié le droit canon et le droit civil à Paris et Orléans. En 1299, il est nommé évêque de Fréjus. En 1309 il devient chancellier de Charles II de Naples et est nommé en 1312 Cardinal de Porto.

La renommée de cet homme de bien, contribue à son élection à la papauté en 1316, mettant un terme à la longue querelle de succession au pape Clément V. Le 7 août 1316 il succède au Pape Clément V et transfère définitivement la cour papale en Avignon. Jean XXII est élu en raison de son grand âge, 72 ans, qui ne le prédestinait qu’à un règne « intérimaire ». Ancien évêque d’Avignon, c’est tout naturellement qu’il s’y installe, et, malgré son intention de ramener la papauté à Rome, il y restera jusqu’à sa mort, 18 ans après.

Deuxième pape à régner en Avignon (de 1316 à 1334). Il a contribué à centraliser l’administration de l’église, condamné les « Franciscains spirituels » et réaffirmé l’autorité papale lors des élections à l’empire d’Autriche.

Pendant cette première période, de 1309 à 1376, sept papes se succèdent à Avignon : Clément V, Jean XXII, Benoît XII, Clément VI, Innocent VI, Urbain V et Grégoire XI. Ces années vont radicalement transformer la ville et la marquer d’une empreinte à laquelle elle doit encore sa renommée mondiale.

Jean XXII participe à la prospérité de l’Église et rétablit la doctrine catholique sur le droit de propriété. Son action incessante le conduit à fonder les universités de Cahors et de Cambridge, à évangéliser l’Afrique et la Chine, à partir en croisade contre les Turcs. Cependant, les besoins financiers grandissent, et le système de fiscalité qu’il inaugura jeta le discrédit sur la papauté en Avignon.

Dès le début de son pontificat, Jean XXII prend parti dans le conflit ancien qui oppose deux factions dans l’ordre des Franciscains : les « Spirituels », qui prônent une adhérence stricte aux règles de pauvreté de Saint François, et les « Conventuels », qui ont une approche plus large. Il soutient les Conventuels et persécute les Spirituels qui s’opposent à lui. Plus tard, il condamnera toute la théorie de la pauvreté évangélique dans deux décrets : « Ad Conditorem Canonum » (1322) et « Cum Inter Nonnullos » (1323), utilisant des preuves tirées de l’écriture pour démontrer que le Christ et les apôtres auraient possédé des biens temporels.

Jean intervient également dans la querelle qui oppose Louis de Bavière (l’empereur Louis IV) et Frédéric d’Autriche pour la couronne du Saint Empire Romain Germanique. Il excommunie Louis de Bavière mais le 18 avril 1328, celui-ci fait déposer Jean XXII à Rome. Le franciscain Pierre de Corbara (Pietro Rainalducci) est alors élu antipape sous le nom de Nicholas V et est excommunié par Jean XXII.

Ancien évêque d’Avignon, c’est dans cette ville qu’il s’installa, comme deuxième pape, de 1316 à 1334. Jean XII participe à la prospérité de l’Église et rétablit la doctrine catholique sur le droit de propriété. Au cours de son pontificat, Jean XXII contribue à promouvoir l’activité missionnaire en Asie. Il crée des évêchés catholiques en Anatolie, en Arménie en Iran et en Inde. Il fonde une bibliothèque pontificale à Rome et une université à Cahors et à Cambridge, il contribue à évangéliser l’Afrique et la Chine, il part en croisade contre les

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Cahors, la Tour dite du Pape Jean XXII

Turcs. Cependant, les besoins financiers grandissent, et le système de fiscalité qu’il inaugura jeta le discrédit sur la papauté en Avignon.

Il contribue également à à fortifier diverses places fortes afin de protéger les alentours de la cité papale. De son pontificat datent le surhaussement du donjon féodal et les fortifications de l’église de Saint-Laurent-des-Arbres.

Successeur de Clément V (qui prit une part active au démantèlement de l’Ordre du Temple sous le règne de Philippe Le Bel), Jean XXII aurait fait partie, officieusement, du premier groupe d’hommes qui fondirent les légendaires Frères Aînés de la Rose Croix (F.A.R.+C.). Roger CARO, dans son Legenda, montre avec force détails, comment Jean XXII fut initié au Grand Art par ce dernier groupe de Templiers, révélant son intérêt pour la « Chimie de Dieu ». Dans les deux traités « L’Elixir des Philosophes » et « L’Art Transmutatoire », Jean XXII nous délivre ses connaissances très détaillées et nous lègue ainsi le témoignage opératif d’un alchimiste du 14e siècle.

Sur son lit de mort, Jean XXII doit rétracter les propositions énoncées lors de ses derniers sermons. Il mourut le 4 décembre 1334 laissant la mémoire du plus grand pape d’Avignon. Il fut le 194e pape.

Pierre Duèze, frère de Jean XXII, avait fait édifier vers 1322 un palais situé en haut de la ville. Une tour des remparts, construite le siècle précédent, y fut incluse. Cette tour s’orne de fenêtres du XIVeme siècle

Autres sites internet :

Jean XXII (Wikipédia)

Jean XXII (Compilhistoire)

Uc de Saint-Circ, un père de la Renaissance Italienne

Uc de Saint-Circ est né à Thégra à la fin du XIIème siècle. Son père, petit vavasseur (1), avait dû quitter son château de Saint-Cirq (graphie actuelle) situé sur l’actuelle commune de Couzou, sans doute ruiné par Henri Court-Mantel lors du sac de Rocamadour en 1183. Pour éviter une copropriété des biens familiaux (selon la coutume occitane, cadet d’une nombreuse fratrie, il était copropriétaire de ses biens avec ses frères) ses frères l’envoient étudier à Montpellier où on le destinait à l’état de Clerc.

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Château de Saint-Cirq (graphie actuelle)

Rappelons que Montpellier, alors sous la domination des rois d’Aragon et de Majorque, était une ville universitaire très importante où se retrouvaient de nombreux quercynois. Inversement, les professeurs de Montpellier enseignaient à l’Université de Cahors. Dans la capitale culturelle des rois d’Aragon où l’apport scientifique des musulmans et des juifs est important, Uc a pu acquérir, au moins en partie, les trois premières branches du savoir, le trivium : grammaire (latin classique), rhétorique et logique. Mais il ne devient pas clerc, il se fait jongleur et entre au service du comte de Rodez, du vicomte de Turenne et du bon dauphin d’Auvergne. Il sert de lien entre ces trois puissantes. Très tôt, il devient troubadour, nous dirions aujourd’hui, auteur-compositeur, un intellectuel profane du Moyen Age.

On le retrouve en Gascogne, auprès de Savaric de Mauléon, de la comtesse de Bénauges, en Poitou puis en Aragon et en Castille. En Provence enfin, d’où il gagne la Marche de Trévise vers 1220. Là il prend épouse et dernière date connue de sa vie, est accusé d’hérésie et d’usure en 1257 (Cathare ou bien Cahorsin ?). En Italie du nord, son rôle est fondamental dans la gestion de la Renaissance. Exilé, faidit, il apporte à sa patrie d’adoption le texte troubadouresque. Sur place il crée des vidas, premières biographies de troubadours marquées par la nostalgie d’un temps heureux, d’un pays perdu et remis dans le droit chemin obscurantiste par la ruée des croisés. C’est le point de départ, en Europe, de la critique littéraire en langue vulgaire et de la nouvelle en prose. Il y a un suivi des vidas au Novellino anonyme puis à Boccace et jusqu’à nos jours.

Uc est ainsi devenu, en Italie, un poéticien, un maître du trobar et plus encore, selon l’expression de Robert Laffont : « Le grand témoin de l’Occitanie en Italie ». Il ne nous reste qu’une cinquantaine de textes écrits par Uc et trois musiques qui permettent d’entrevoir un musicien de talent. Son œuvre est un « roman vécu ». Enfin, nous savons depuis peu, grâce aux travaux de Saverio Guida de l’université de Messine, qu’Uc de Saint-Circ et Uc Faidit sont une seule et même personne. Uc Faidit écrit vers 1240 le Donatz proençals, une grammaire, un traité de versification suivi d’un dictionnaire des rimes. Deux versions : une en oc et l’autre en latin. L’ouvrage est novateur (les exemples sont créés et non empruntés) et permettra à Dante, en différenciant le volgare du latino, de promouvoir l’italien moderne.

Depuis quelques années, l’Association Thégra Animation fait revivre Uc de Saint-Circ à travers un son et lumière retraçant sa vie et lui a consacré un colloque en 1998. Un cd de Gérard Zuchetto a été enregistré dans l’église de Thégra.

D’après : Anthologie des Poètes du Quercy, par Gilles Lades, éditions du Laquet et Encyclopédie du Lot, Bonneton.
Auteur : Gaston Bazalgues, Encyclopédie Bonneton, 2000

(1) VAVASSEUR, subst. masc. C’était le vassal d’un autre vassal, ou celui qui tenait un fief d’un vassal qui relevait lui-même d’un seigneur. D’autres historiens entendent que Vavasseur était une dignité immédiatement au-dessous de celle de baron.

Luctérius, première grande personnalité qu’aient connu les terres du Quercy…

Premier siècle avant J.-C., Lucterios (aussi connu sous la version latinisée Lucterius) est le dernier chef gaulois à résister à Jules César. Un an après la reddition de Vercingétorix à Alésia, Lucterios et Drappès se réfugient dans l’oppidum d’Uxellodunum où eut lieu la dernière bataille de la guerre des Gaules, en 51 avant J.-C. Il trouve refuge chez le chef arverne Epasnactos, qui le livre à César. Wikipedia

Lucterius est le nom du véritable Abraracourcix, c’est-à-dire du véritable dernier chef gaulois qui résista à César. Son retranchement ne s’appelait pas Petitbonum mais Uxellodunum. Il n’était pas en Bretagne mais dans le Quercy. En plus de ces légers détails et pour tout le reste il ressemble plus à Asterix : il était courageux, volontaire, plein de bonnes idées, sans peur et sans reproche. La ressemblance avec la bande dessinée est d’ailleurs si forte que, aussi incroyable que cela paraisse, les disputes en Quercy n’en finissent pas pour savoir exactement où était situé l’oppidum d’Uxellodunum.

Gravure représentant Uxellodunum comme on se l’imaginait au XVIème siècle.

La première grande personnalité qu’aient connu les terres du Quercy est sans nul doute Luctérius. A l’époque où vécut Luctérius le Quercy n’existait pas sous ce nom du moins, c’était le pays des Cadurques, nom du peuple qui habitait ces terres. Luctérius s’est grandement distingué durant les deux dernières années de la guerre des Gaules, mais ne semble pas être reconnu à sa juste valeur par les historiens lotois. Il fit pourtant preuve d’ héroïsme sur le territoire même du Quercy. Nous savons que Luctérius vécut durant le premier siècle avant J.C., et nous connaissons ses agissements grâce aux témoignages de César ainsi que d’Hirtius (compagnon de César), qui sont relatés dans les livres VII et VIII de la Guerre des Gaules (Bello Gallico).

Luctérius était issu du peuple des Cadurques, qui occupé approximativement le territoire de l’ancienne province du Quercy. Il fut une des grandes figures de la Gaule un allié de Vercingétorix et vraisemblablement, également un ami. Son peuple, les Cadurques furent en effet parmi les premiers à répondre à l’appel à la rébellion de Vercingétorix. Le grand César lui-même se méfiait de Luctérius dès le début de la révolte gauloise, qualifiant le chef Cadurque d’être un homme « d’une extrême audace ».

On sait que Vercingétorix l’envoya dans le territoire des Rutènes, peuple voisin des Cadurques, sur qui il devait avoir une certaine influence, le livre VII de la guerre des Gaules nous rapporte ceci : « Luctérius le Cadurque qui avait été envoyé chez les Rutènes les gagne aux Arvernes. Bien mieux il trouve de nouveaux alliés dans son voisinage : les Gabales du Gévaudan et les Nitiobriges de l’Agenais. Puis ayant réuni une forte troupe il entreprend d’envahir la Province en direction de Narbonne ». Il contraint César qui revenait d’Italie, à rejoindre Narbonne où il fit fuir ses troupes .

Puis, bien qu’il ne soit pas nommé, on peut déduire que Luctérius ait été présent à l’assemblée de Bibracte, qui se déroula après le succès de Gergovie. Vercingétorix décida alors d’empêcher César de rentrer en Italie, et distribua alors les règles à chacun. « Il envoie les Rutènes et les Cadurques ravager le pays des Volsques Arécomiques ». Luctérius descendit donc une nouvelle fois vers la Province romaine.

Mais la suite des événements perturba les plans Gaulois. Vercingétorix se retrouve encerclé dans Alésia et effectue un appel, 12.000 hommes sont alors réclamés aux Rutènes, 35.000 aux Cadurques, afin de former une armée de secours capable de libérer les assiégés d’Alésia.

Luctérius fut donc vraisemblablement présent au siège d’Alésia, puisque l’on nous dit qu’il en a « gardé un douloureux souvenir », au moment où il prépare la ville d’Uxellodunum à ce qui sera l’ultime siège mené par César en Gaule.

Uxellodunum, les irréductibles

Après la déroute d’Alésia, notre chef Cadurque, ne désarma pas, et continua à vouloir résister à l’envahisseur. Luctérius, s’associe alors à un autre chef rebelle, Drappès de Sens, à eux deux, il vont vivre les derniers moments de la lutte pour l’indépendance gauloise. En 51 avant J.C., les deux chefs gaulois Drappès et Luctérius sortant de l’enfer d’Alésia, vont prêter main-forte à Dumnacos qui se bat du côté de Poitiers. Ils subissent là une nouvelle défaite par Labiennus, mais rassemblent quelques 3000 rescapés ils descendent dans le sud. Mais, poursuivis par Caninius et ses deux légions, ils s’enferment dans la ville d’Uxellodunum qui se situait dans le pays des Cadurques.

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Enluminure médiévale origine BNF représentant la bataille d’Uxellodunum

Luctérius, qui eut autrefois cette ville dans sa clientèle, gagna facilement les habitants à sa cause. Les deux chefs, décidèrent alors d’aller faire de grandes provisions de blé, afin de pouvoir tenir un long siège. C’est lors d’un des convois pour introduire du blé dans la place, que la troupe de Luctérius est surprise. Tous les Gaulois furent alors massacrés, seul Luctérius et quelques hommes purent s’enfuir. Les hommes de Drappès furent également défaits. Drappès fait prisonnier, honora sa mort en ajoutant volontairement la privation de toute nourriture aux douleurs que lui causaient les fers dont il était chargé, il se laissa mourir en peu de jours. Fabius et deux légions, puis César lui-même avec toute sa cavalerie ainsi que Calénus avec deux légions vinrent continuer le siège Uxellodunum où il ne restait plus que deux mille défenseurs dépourvus des deux chefs emblématiques Drappès et Luctérius.

Les Gaulois était bien pourvus en vivre, César résolut donc de les priver d’eau. Portant des archers, des frondeurs et des machines de guerres sur la rive gauche de la rivière qui entourait presque toute la montagne sur laquelle la ville était juchée et en face des pentes plus aisées, les Gaulois ne possédaient plus pour s’approvisionner en eau qu’une source au nord de la place qui coulait au pied du mur de celle-ci. César fit construire une terrasse (agger) de 18 m, une tour de 10 étages du haut de laquelle de l’artillerie empêchait les Gaulois de sortir de leurs murs. Par des tranchées couvertes et des galeries sous roche, les Romains parviennent à tarir la source et les Gaulois se rendirent. César fit couper les mains à tous ceux qui avaient porté les armes et se fit livrer Lucter par Epasnactos. Drappès lui se laissa mourir de faim.

Quant à Luctérius, qui était parvenu à s’enfuir, il fut livré à César par le chef Arvernes Espagnactos

Jacques-Joseph Champollion rappelait dans son ouvrage « Nouvelles recherches sur la ville gauloise d’Uxellodunum », que « les auteurs romains avaient écrit de ces deux chefs Gaulois que ce qu’ils ont cru dire de défavorable à leur mémoire. » Le même auteur écrivit sur Luctérius, que son « sort variable des armes le ramenant dans son propre pays, il y rendit ses compatriotes témoins de ses derniers efforts pour l’indépendance des Gaules, et vint, chargé de chaînes, expier, en présence de César, son inutile courage. »

Jacques-Joseph Champollion constatait avec regret, au sujet de Luctérius le Cadurque, qu’ « aucun monument public n’en consacra le souvenir ; l’empire des vainqueurs ne pouvoit le permettre ». Champollion l’aîné, découvrit néanmoins une inscription latine inédite qui se trouvait à Pern, sur une pierre de marbre servant de marche pied à l’autel. L’inscription en beaux caractères romains laissait lire : MARCO LUCTERIO. Champollion Figeac, alors accompagné de M. Lacoste (Hist. de la province Quercy en 4 vol.) purent déchiffrer la précieuse pierre, qui indique que ce monument fut élevé par la cité des Cadurci à Marc Lucter, surnommé Lion, fils de Lucter surnommé Senicianus, qui avait exercé toutes les charges publiques dans sa patrie, et qui était alors le prêtre envoyé par la même cité pour desservir l’autel dédié à Auguste, situé au confluent de la Saône et du Rhône, à Lyon.

Jacques-Joseph rappelait que « plusieurs monuments de même genre que celui-ci rappellent les noms de quelques prêtres de l’autel que les soixante cités des Gaules consacrèrent à Auguste .» Cette tablette est très importante, car le Marc Lucter mentionné est un descendant de notre Luctérius, qui fut le dernier chef Gaulois connut à lutter pour l’indépendance de son peuple. Il pourrait même être le petit fils du grand chef rebelle. Encore de nos jours, nous ne connaissons pas le sort qui fut attribué à notre illustre irréductible gaulois, César l’emmena-t-il à Rome comme Vercingétorix, ou bien sa soumission lui a-elle sauvée sa vie ? A l’heure actuelle nul ne peut prétendre le savoir.

Jacques-Joseph Champollion regrettait en 1816, qu’aucun monument n’eut était consacré à Luctérius, de nos jours le constat reste le même, seul un buste en marbre blanc exécutée en 1844 par un certain Dominique Molhnet, qui est exposé à la bibliothèque municipale de Cahors, honore la mémoire du grand Luctérius. A noter que Capdenac qui prétend être le lieu de l’ancienne Uxellodunum, a appelé sa place principale, « place Lucter ».

Mathieu MARTY

 

Manoir de Mordesson

La légende de Bertheline de Mordesson

Texte publié en 1942 à Saïgon dans « l’écho d’extrême-orient » Yves Desjeux

 » Sur la verte colline, en un vol de batailles,
Le vieux Manoir, jadis, a connu les fureurs ;
Les cris des chevaliers, et le sang des entailles,
Ont rougi ses vieux murs, de leurs rouges clameurs.
Joseph de Salvagnac

 

Lorsqu’il mourut, aux environs de 1360, Guarin de Castelnau, seigneur de Gramat, Loubressac, Lavergne, Prangères et autres lieux, laissait pour unique héritière une jeune fille de 18 ans répondant au nom de Bertheline. Pour supporter les charges d’une si vaste seigneurie Bertheline dut ajouter à la beauté et à la noblesse de sa naissance, les qualités de courage et d’audace qui font l’honneur du sexe fort . Les temps étaient durs ; l’anglais ravageait la Guyenne et le Quercy et les troupes de Jehan Chandos traînaient le massacre et le pillage sur leurs traces.

A la sombre forteresse de Castelnau, aux cinq puissantes tours de son château de Gramat, Bertheline préférait les agréments plus champêtres de sa baronnie de Prangères. Là, parmi les bois de châtaigniers, sur les hauteurs qui dominent le petit lac et d’où la vue s’étend très loin vers la cité de Gramat, les baronnies de Lavergne et Bio, et vers le couchant jusqu’aux gorges de l’Alzou et au-delà de Notre Dame de Rocamadour, Guarin de Castelnau avait fait construire le manoir de Mordesson.

C’était un rude homme le vieux Guarin. Mais les délicatesses de l’amour paternel et le sens du beau se rencontrent aussi chez les âmes rudes. Rien n’avait était négligé à Mordesson pour que l’enfance de Bertheline fut ensoleillée et charmée de tout ce que la nature et l’industrie des hommes peuvent apporter de beauté et de douceur de vivre. Aussi la jeune fille y passait-elle tout le temps que lui laissait l’administration de son vaste domaine.

Bertheline ne connut pas ces difficultés qui font trop souvent le malheur des dynasties quand les charges viennent à en retomber sur des épaules trop faibles. On se souvenait des vertus du vieux Guarin et l’on conservait à son héritière, la même fidélité loyale, avec, en plus, l’admiration que l’on a pour une jolie fille, douce et bonne. Jamais le grand et bel Amaury de Valon, seigneur de Lavergne et de Thégras, ni Jehan de Miers , que l’on appelait  » le brave « , ni Amidieu de La Rocque, réputé pour son exquise courtoisie, jamais cette fleur de la chevalerie n’eut voulu profiter de ces circonstances pour briguer un pouvoir tombé aux mains d’une femme ; ils se fussent crus déshonorés et malheur à quiconque oserait porter la main sur leur charmante suzeraine, car leurs épées et leur sang étaient garants de leur loyauté.

C’est pourquoi dans cet après-midi de juin 1369 ils étaient réunis à Mordesson, dans la salle du Conseil, autour de la robe blanche de Bertheline. On avait signalé dans la région l’approche des anglais, et toutes les forteresses de la seigneurie étaient garnies d’hommes d’armes. Mais c’était sur Mordesson que se dirigeait Jehan Péhautier capitaine de cinquante lances, parce que le château n’ayant pas de remparts, il pouvait s’emparer facilement de l’héritière de Guarin de Castelnau. Bertheline s’entretenait avec chacun comme un chef et comme un ami. Amaury de Valon, Jehan de Miers et quelques autres seigneurs renouvelaient leurs serments de loyaux services ; mais nul n’espérait autre chose que porter haut sa bravoure et son honneur, car ils savaient le cœur de Bertheline promis au jeune vaillant Bertrand de Terride, puissant en Périgord.

Il y avait aussi, près de leur suzeraine, les consuls de Grandes : Jean Cornilh, Jean de Merle, puis Hugues Orliac qui portait un jeune taureau sur ses épaules aux fêtes de la dîme, Bénédict Lafont, Bartolomé Darnis réputé pour sa connaissance des coutumes et des lois romaines, et enfin Antoine Bergonhos dont la richesse était l’occasion d’un proverbe. Tous étaient là, près de Bertheline parce que la vie, l’indépendance et la fortune de tous étaient en cause.
– Madame, dit Amaury de Valon, si vous le permettez, nous chanterons la chanson du Chêne et du Gui.
Bertheline rougit légèrement, car la chanson était d’elle. Les vois fortes et timbrées se mêlèrent à la sienne , et la mélodie jaillissait cristalline et fraîche comme les sources de l’Alzou , car, comme elles, elle s’exhalait du terroir.
 » L’ennemi ! Voilà l’ennemi !  » Le guetteur descendit de la tour ; il avait vu les cinquante lances de Jehan de Préhautier étinceler sur les glèbes du Causse-Nu, et l’on entendait les truands crier de joie dans l’espoir d’un triomphe facile. Mordesson n’avait pas de remparts.
Déjà Jehan Préhautier, le fer au poing avait pénétré dans la salle du Conseil, laissant sa horde dans la cour intérieure
 » – Quel est le Maître de céans ?  » rugit-il ! .
La jeune fille s’avança :
 » – Je suis Bertheline de Mordesson, seule héritière de Guarin de Castelnau. Que me voulez-vous ?
Le soudard perdit sa morgue. Le charme d’une femme est une arme redoutable pour les plus fiers soldats, parce qu’ils n’en rencontrent pas souvent sur leur chemin. Mais Jehan de Préhautier rêva d’une aventure singulière : sa voix rude prit des intonations plus douces et refoulant les injures qu’il s’apprêtait à dire, le routier chercha des termes dont il n’était pas coutumier :
 » – Je suis Jehan Préhautier, dit-il, capitaine de cinquante lances pour très haut et très puissant seigneur Jehan Chandos La valeur de ceux qui combattent sous la bannière de messire Saint Georges n’est plus à dire et l’on sait quelles ruines ensevelissent à cette heure ceux qui leur ont résisté. Mais c’est un autre sentiment que j’apporte dans cette enceinte.
Ce cœur qui ne frémit jamais dans les plus terribles rencontres, je le dépose à vos pieds, Madame, et pour peu que vous l’acceptiez, les gens d’armes qui vous défendent compteront cinquante lances de plus dans votre parti.  »
 » – Vous outragez, capitaine ! La fille de Guarin de Castelnau ne donnera pas sa main à un coureur d’aventures qui n’a de sang à son blason que celui de victimes innocentes.
Vous ignorez sans doute que le sang des Castelnau s’est mêlé à celui du Roi des Cieux en coulant aussi sur la Terre Sainte ! C’est là qu’il a gagné ses titres de noblesse. Et vous, capitaine, de combien de quartiers s’honore votre maison ?  »
Jehan Préhautier blêmit. C’était lui rappeler qu’il n’était qu’un capitaine d’aventure et que jamais le crime pour lui ne s’était distingué de la geste. Il voulu prouver qu’il connaissait aussi les bonnes manières de la chevalerie :
 » – Votre injure appelle vengeance, Madame. Désignez donc parmi les vôtres , celui qui m’en rendra raison  »
 » – Mes partisans sont de bonne lignée, capitaine, et nul ne dérogera. N’attendez donc point les honneurs d’un combat singulier avec un sang plus noble que le votre.  »
 » – Çà , Madame, vous m ‘en rendrez compte vous-même ! Je veux vous enfermer dans les prisons de votre château !  »
 » – Il n’est point de prisons à Mordesson, capitaine. Sans doute en eut-on construit si l’on avait songé qu’un capitaine de mauvaise rencontre s’aviserait un jour de tenir ici le langage d’un truand.  »
 » – Vous m’outragez encore, dit Jehan Préhautier au comble de la rage, mais prenez garde qui si truand suis, ne porte la main sur vous !  »
 » – Vous m’avez outragée d’abord, capitaine, réclamant ma main pour prix de votre trahison. Mais ce n’est pas un tel paiement qu’il faut aux gens de votre espèce : c’est trente deniers.  »
Jean Préhautier se fut lancé sur elle. Mais déjà Amaury de Valon levait son épée. Préhautier prit du champ :
 » – A moi compagnons, cria-t-il, et mort de sang !  »
Les truands se ruèrent dans l’enceinte, et les paisibles murailles du plus pacifique des castels, résonnèrent du tumulte des grands combats. Les injures des soudards se mêlaient aux défis des chevaliers, les épées s’entrechoquaient avec les masses d’armes, les pertuisanes recherchaient les défauts des cuirasses et les fentes des bassinets, et sur les tapisseries faites pour la joie des regards, le sang des hommes se mêla aux riches couleurs de l’art.
Bertheline, derrière le rempart des poitrines loyales, était agenouillée devant une effigie de Notre Dame de Roc Amadour :
 » – Bonne Dame, disait-elle, voyez ici combatre vos gentils seigneurs : Amaury de Valon qui richement dota le sanctuaire et Jehan de Miers qui prit la bannière des pèlerins et Amidieu de La Rocque qui bellement chante le cantique à l’office de la Mère-Dieu. Bonne Dame soyez en leur garde.  »
Maître Jehan Cornilh qui est sage et de bon conseil s’approcha d’elle :
 » Madame, dit-il, il convient fuir ! Quand truands sont plus de trois pour un, oncques chevalier ne l’emporte. Il convient fuir, Madame, pour le salut de votre baronnie !  »
 » – Fuir, Maître Cornilh ? Les Castelnau ont quelques fois péri sous le nombre, mais jamais montré le dos !  »
 » – Votre vie n’est point votre, Madame, reprit sévèrement Jehan Cornilh. Vous la devez à votre baronnie. Il convient fuir, que je vous dis !  »
Bertheline fit un grand signe de croix sur Maître Cornilh. Mais il ne disparut pas avec cette odeur de souffre qui caractérise les créatures du Malin et Bertheline comprit alors qu’il était de bon conseil. Elle disparut par la petite porte de la tour, sortit du Manoir, par la poterne qui n’était point gardée et s’enfuit par le sentier du lac.
 » – Messire, dit un truand à Jehan Préhautier, la Dame de céans s’est échappée par la poterne !  »
 » – Mort de sang, hurla le capitaine ; en selle compagnons et rattrapons-la ou j’y perdrais mon âme ! Mort de sang, mort de sang !  »
La poursuite fut infernale. Le sentier qui conduit au lac, à peine large pour Bertheline, fut le tombeau d’un grand nombre. Les cavaliers se heurtaient dans le torrent de la chevauchée, se brisant entre eux, tombant sous le flot des bêtes ou se broyant contre le tronc des chênes. Les injures se mêlaient aux cris désespérés, les blasphèmes et les hurlements se noyaient dans le fracas des cuirasses.
 » Mort de sang ! Mort de sang !  » hurlait Péhautier, mais le sang ruisselait des siens et la mort planait sur lui-même.
Légère comme les biches de la forêt, adroite comme elles, Bertheline avait gagné le lac quand les truands étaient à peine en selle. Là, à l’orée du chemin de Darnis, elle se heurte à l’Archange Saint Michel. Du moins, elle le crut, tant la splendeur du blanc cheval d’armes n’avait de comparable que l’éclatante armure du chevalier.
 » Voilà, pensa-t-elle l’archange des combats que m’envoie Notre Dame de Roc Amadour..  »
Sans mot dire le beau chevalier l’enleva de terre et la plaçant en croupe, piqua des deux en direction de Roc Amadour. A peu de distance le vacarme des poursuivants faisait trembler la forêt. Les imprécations de Jehan Préhautier parvenaient aux oreilles des fugitifs, mais le cheval de l’archange bondissait comme dans les miracles, rapide et léger comme le cheval de Dieu.
On traversa Darnis, puis Saint Germain de Rignac dont le moutier abrite des Saints, puis l’on s’engagea dans le petit sentier rocailleux qui mène à la Roque du Souci. Tout à coup Bertheline se rappela le gouffre sans fond vers lequel ils allaient tout droit et sa frayeur était grande. Mais un archange ne périt pas comme un simple mortel et sa Foi était encore plus grande que sa frayeur. Le blanc cheval galopait, museaux fumants, étincelant des quatre fers à l’allure du vertige et fonçait droit vers l’abîme.
Le cavalier céleste se signa en piquant des deux, le cheval s’envola dans les airs pour retomber de l’autre coté du précipice laissant l’empreinte de ses sabots dans la pierre. Et Bertheline sut que Madame Marie l’avait en garde. Mais emporté dans la violence de la chevauchée, Jean Préhautier et ce qui restait de ses cinquante lances furent se briser dans la Roque du Souci dans un tumulte effroyable d’os broyés et de blasphèmes.  » Mort de sang ! Mort de sang ! criaient-ils encore ; mais déjà avec leurs voix leurs âmes se perdaient en Enfer !
Les fugitifs, miraculeusement sauvés s’étaient arrêtés pour remercier Notre Dame de Roc Amadour Le chevalier sauveur souleva la visière de son heaume et Bertheline poussa un cri…
 » – Bertrand ! C’était vous ! Oh ! Bertrand !…
 » – Oui, Madame, c’est bien moi Bertrand de Terride qui loue le Ciel parce qu’il ma donné en vous sauvant la vie, de mériter ce cœur que vous m’avez promis. En apprenant que l’anglais ravageait les plateaux du Quercy, sans plus tarder suis venu car vous étiez en grand danger et perte certaine. Et m’en voyez heureux , Madame, comme oncque chevalier de bon encontre ne put l’être jamais !  »
Arrivés à Roc Amadour les deux jouvenceaux s’en allèrent trouver Madame Marie en son sanctuaire, et prièrent longuement. Belle était leur prière et leurs voix montaient le long du rocher béni vers la Vierge Noire , au milieu de la fumée des cierges et de l’odeur de l’encens. Messire Rogier de la Roque qui est premier chapelain de Notre Dame en son sanctuaire de Roc Amadour, entra dans la chapelle.
 » – Messire, dit Bertheline, voici Bertrand de Terride que je choisis comme époux devant Dieu.  »
 » – Messire, dit Bertrand de Terride, voici Bertheline de Castelnau que je choisi comme épouse devant Dieu.  »
 » – Soyez unis !  » répondit Messire Rogier de la Roque, premier chapelain de Notre Dame, en son sanctuaire de Roc Amadour.
Et cela se passait un jour de juin 1369.

Cette légende a été rapportée au début du siècle dernier par l’Abbé Bargues, curé de Prangères, à Yves Desjeux qui l’a transcrite pour sa pérennité.

 

LA CHANSON DU CHÊNE ET DU GUI .

Elle tremblait, la terre
Quand marchaient nos aïeux

Ils n’aimaient que la guerre
Ne craignaient que les cieux.
A Rome désarmée
Ils dictèrent les lois
En y jetant le poids
De leur vaillante épée.
Vaincus parfois, pour l’esclavage,
Non, jamais ! ils ne furent prêts.
Pour échapper à cet outrage
Allant dans leurs sombres forêts
Fer en main ils touchaient l’emblème.
De leur rude pas
Ils volaient de nouveau dans les combats suprêmes,
Pour n’être point soumis.
Qui donc leur forgerait leurs chaînes
A ces fils du Quercy ?
Ils étaient forts comme leurs chênes.
Et toujours verts comme leur gui !
César, aux lois de Rome
Voulut nous asservir,
Mais la Gaule eut un homme
Et qui savait mourir !
Héroïque Luctère
Redouté du vainqueur
Entends la Gaule entière
Te dire avec son cœur
La mort ! mais non pas l’esclavage !
Pour lui nous ne sommes pas prêts
Pour échapper à cet outrage
Allons dans nos sombres forêts
Là, nous contemplerons l’emblème
De notre fier pays.
Nous mourons s’il le faut dans les combats suprêmes
Pour n’être pas soumis.
César nous forgerait des chaînes
A nous , fils du Quercy !
Nous sommes forts comme des chênes
Et toujours verts comme leur gui !
Aujourd’hui, l’Angleterre
Veut te donner sa loi,
Et pense par la guerre
Avoir raison de toi.
De toi, terre des braves
De toi ,terre des forts !
Ah ! brise ses entraves
Affronte mille morts.
Oui ! la mort ! jamais l’esclavage
Pour lui nous ne sommes pas prêts !
Pour échapper à cet outrage,
Allons dans nos sombres forêts.
Là, serrant dans nos bras l’emblème
De notre cher pays
Nous mourrons s’il le faut dans les combats suprêmes,
Pour n’être pas soumis.
L’Anglais nous forgerait des chaînes,
A nous fils du Quercy !
Nous sommes forts comme nos chaînes,
Et toujours verts comme leur gui !

Ecuelle de Capdenac

L’écuelle de Capdenac

« J’ai insisté pour que cet article, soit publié, d’une part à cause du symbolisme chrétien, dont l’écuelle constitue un précieux témoignage, et aussi pour l’éclairage qu’elle apporte sur la présence des Cathares à Capdenac. »  Danielle PORTES Historienne des religions  Paris IV-Sorbonne

C’est au début des années 1990, que fut retrouvée à l’occasion de travaux de réfection des rues de Capdenac le haut, une très jolie écuelle, qui porte en son fond en ornement, un poisson assez naïvement représenté. C’est mon frère Julien et moi-même qui somme à l’origine de cette belle découverte faite dans la rue de la commanderie, proche de notre boulangerie familiale.

Ecuelle de Capdenac

Ecuelle de Capdenac

Nous conservâmes pendant longtemps ce fabuleux vestige à notre domicile, avant d’en faire don à l’Office du Tourisme, que le présente aujourd’hui dans son musée situé au premier étage du donjon de Capdenac.

Ce vestige fascina pendant longtemps toute ma famille, et il est donc logique que je tente de faire connaître le résultat de mes recherches, ainsi que mes conclusions, qui ne sont peut être pas définitives.

Le poisson représenté au fond de cette écuelle nous ramène obligatoirement au symbolisme sacré. En effet, il fut le symbole utilisé par les premiers chrétiens, comme signe de reconnaissance durant la persécution que leur firent subir les Romains.

En grec, le mot poisson se dit IXOYC (ICHTHYS). Disposé verticalement, ce mot formait un acrostiche (mot grec signifiant la première lettre de chaque ligne ou paragraphe). Le nom grec du poisson fut donc utilisé pour désigner les mots suivants : I : Iesous : Jésus  CH : Christos : Christ  TH : Theou : de dieu Y : Yios : le fils  S : Soter : le sauveur

Interprété comme acrostiche, ICHTHYS signifiait donc littéralement : « Jésus Christ, fils de Dieu, notre Sauveur ». Le simple symbole d’un poisson, représentait ainsi un véritable résumé de la foi chrétienne. On le retrouve sur de nombreux monuments funéraires des IV premiers siècles de notre ère, comme dans les catacombes à Rome. Les textes juifs, également annonçaient que le Messie viendrait de la mer sous la forme d’un poisson. La représentation des chrétiens, était donc la suite logique donnée aux écritures saintes.

C’est vers les IV-Vème siècles, que fut délaissé ce symbole. L’Eglise, qui possédait maintenant le pouvoir, préféra prendre comme nouveau symbole la « croix latine » comme signe et symbole de la chrétienté. L’Eglise fraîchement installée mena une lutte sans merci contre les anciennes croyances, la croix représentée la passion du Christ, c’était un objet unique, que le Messie lui-même avait transporté, alors que le poisson se rapportait aux forces naturelles, autorisant de multiples interprétations.

De plus le poisson était utilisé comme symbole dans plusieurs religions antérieures au christianisme, en sanscrit, le dieu de l’amour se nommait « celui qui a le poisson pour symbole ». C’est donc l’Eglise elle-même qui préféra abandonner le symbole qui unifia pendant longtemps les premiers chrétiens, qui transportèrent leurs nouvelles idées au milieu de populations hostiles.

L’écuelle retrouvée à Capdenac date des environs des XII-XIIIème siècles, et à cette époque, un nouveau mouvement vit le jour, et se répandit particulièrement en Occitanie, dont Capdenac faisait partie, dépendant directement du comte de Toulouse. Les membres de ce mouvement, nous les appelons aujourd’hui Cathares. Leur façon de vivre et de pratiquer leur religion se rapprochait des premiers chrétiens, et se détachait de l’Eglise de leur temps, qu’ils disaient corrompus et avide de richesses et d’honneurs. Les Cathares furent persécutés comme les premiers chrétiens, mais eux le furent par d’autres chrétiens.

Ce symbole pourrait tout à fait avoir été remis au goût du jour par les cathares, ce symbole désignant les premiers chrétiens, les chrétiens purs, qui comme les Cathares, avaient abandonné toute possession de richesses matérielles. Les Cathares peuvent tout à fait être associés aux premiers chrétiens, et le symbole du poisson aussi.

René Nelli, répertoria les objets présumés remonter à l’époque Cathare. Ce rigoureux professeur Carcassonnais considéra comme probablement cathares les symboles religieux datés du XI-XII-XIIIème siècles et dont les exemplaires sont trouvés avec une fréquence notable sur les sites cathares.Or déjà deux poissons furent inventoriés, un à Ussat, et un autre gravé sur un galet à Fontvieille dans le Gard. Ce même auteur nous signale que le scribe du rituel Cathare dit de Lyon fait souvent figurer au bas des pages, l’emblème du poisson.

L’écuelle de Capdenac pourrait donc s’avérer comme avoir appartenu à la communauté Cathare, ce qui en ferait une découverte assez exceptionnelle. Il ne faut pas oublier que Simon de Montfort assiégea par deux fois la place de Capdenac durant sa croisade menée contre les hérétiques Cathares, et que Bertrand de la Vacalerie, qui ne fut rien d’autre que l’ingénieur en machine de guerre qui apporta son aide aux Cathares de Montségur, venait du lieu dit « la Vacalerie » de .Capdenac. A suivre…

Mathieu MARTY

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